Nous connaissons tous le pèlerinage à Colombay-les-Deux-Eglises, la marche à la Roche de Solutré, mais, depuis quelques temps un troisième centre d’intérêt semble de plus en plus convoité par l’ensemble de notre classe politique.
Il est situé au fin fond du territoire dans une forêt profonde ou combats et embuscades font rages. Arbres tentaculaires, cavernes et gouffres sans fond, le chemin pour y parvenir est semé d’embuches.
Si vous avez la chance de passer tout ces obstacles, alors vous allez découvrir, comme dans Blanche Neige et les sept Nains une jolie chaumière et son surréaliste miroir :
« IFOPmeledire »
Cet ancien miroir utilisé naguère par la reine de la forêt à des fins esthétiques (miroir suis je la plus belle?) est très convoité par notre nouvel échiquier politique.
La beauté n’est plus de mise, la sorcière et ses pommes empoisonnées ont été chassées sans ménagement.
Les nouveaux utilisateurs : le monarque en tête, les territoires du Nord et de l’Ile-de-France, la reine de Paris, Marine l’ancestrale, l’Insoumis, Naturéo et pacotilles font génuflexions et courbettes en implorant :
Miroir, s’il te plait: « Suis-je la ou le meilleur ? »
Dans ce contexte, tous sont stressés et les surenchères sont de mises : vous serez tous millionnaire - le loto et les gros lots pour tous - du homard tous les soirs.
Mais, les chiffres n’évolues guère, peut être à cause de leur devise commune: « un pour tous, moi d’abord! »
Une question revient sans cesse aux coins de leurs lèvres et les tarabustes au plus haut point.
IFOPmeledire
Par Alain Isenegger
Où en est le score du dernier venu. Ce petit diablotin un tantinet chétif qui rêve de tous nous dévorer.
Le miroir au teint transparent reste de marbre, les chiffres défilent. L’inquiétude est de mise.
Tous font la gueule et souhaiteraient avec de grands pics acérés et un plaisir certain faire tomber ce petit diablotin de son piédestal…
On m'envoie me faire voir
Sur le trottoir d'en face
Mais après réflexion,
Là, ma mémoire s'efface.
Reflet, dans ce miroir,
Qui me suit à la trace,
Imposant la vision
D'un glacis qui se casse.
Mur de glace entonnoir
Maintenant dans sa nasse
Le temps, son érosion,
Ses victoires de guerre lasse.
La route est un couloir
Qui mène à une impasse,
Qui m'offre l'illusion
De n'être point cocasse.
Pourtant, dans ce miroir,
Sachons, quoi que l'on fasse,
Voir la proposition
Qui trompe et qui menace.
Elle détruit tout espoir
En reflétant le strass
Des vilaines passions,
De nos ambitions basses.
Elle détourne du noir
Les ombres qui s'entassent,
Sombrant à l'unisson
Dans nos manques d'audace.
État de ces avoirs
Si lourds que l'on amasse;
Jamais nous ne cessons
D'en nettoyer la crasse.
Je vois, dans ce miroir,
Combien le temps qui passe
Fait perdre la notion
Des choses et de leur place.
Suite à l’assassinat de son ami Achraf, inspecteur au BARO de Grobujot City en Zone Franche, Piero a quitté Shima, capitale de l’empire de Lumus. Il est exilé dans l’émirat de Shamârdadj, à Bégum, en sécurité, à l’abri des sbires de La Grise, la milice de Maréchal-Alexandre, gouverneur de Zone Franche. Il tente de trouver un sens à tout ce fatras grandiloquent de l’existence d’un mouvement Shin qui menacerait le monde et dont Achraf aurait été l’un des membres éminents. Piero a confié son jardin intérieur à son ami Michelin qui, en responsabilité partagée, lui transmet, par messages cryptés, des nouvelles de Shima.
– CC, mon Piero, l’équipe de l’ego me fait savoir qu’elle attend avec impatience ta contribution au numéro de novembre. Le thème en est « Le Miroir ».
– CC, Michelin, faut pas t’énerver comme ça : je n’appartiens à personne. L’ego, c’est parfois douloureux. Sinon, ouvre Géo Trouvetou Images, mots clés « miroir pierre belleney » ; tu trouveras 16 références à l’ego. Donc, c’est clair, il y a un rapport certain entre Piero, un miroir et un ego. C’est la révélation : 16 références à l’ego ; incroyable, j’ai un ego surdimensionné.
J’en profite pour te charger de remercier publiquement mon ami Camille de Archangelis : mon nom est référencé sur le site Decitre, ah, ah, ah ! Eh oui ! j’ai préfacé son recueil de poésie « A l’heure du dernier train ».
– Bon, d’accord. OK, Piero. Et je fais quoi avec ça ?
– Tu connais Le Miroir ?
– La librairie-salon de thé ?
– Oui.
– Pourquoi ?
– La dame y fait bon accueil. C’est une copine, une très bonne copine.
– Mais enfin, Piero, il est mal famé, l’endroit ; que des gousses bourges, des gougnotesgnognotes ! De la peau de socialo ! Les bonnes œuvres ! Disreputable !
– Tu as tes ragnagnas ?
– MDR… enchanté de rencontrer ta copine.
– Alors, tu vois, elle se sent « perdue dans la salle d’un vieux bar, des souvenirs en vrac sur fond de ciel noir se bousculent dans sa mémoire, assise sur des tonnes de cafard, elle reste seule à parler au miroir, il n’y a plus rien à faire que de revoir le film à l’envers. »
– Hum, hum… Il y a comme une fumée qui s’élève au-dessus du palais impérial.
– Un suaire recouvre ton cadavre noirci et de longues flammes lèchent les murs. Entre deux chandeliers, un grand miroir vertical ceint de foulards indiens regarde tomber la nuit.
Le temps casse tous les miroirs qu’on aimait
Par Pierre Belleney
– Ouh, ouh, ouh ! Étang glacé, il me regarde arriver.
– Attends, je réchléfis.
– Face à la cuvette des chiottes, gonflé à bloc, guibolles en fer à cheval.
– Ô miroir de nos désirs, reflets indiscrets, pensées perdues ! à l’abri des regards, dans les pénombres les plus profondes de la chambre close, éclatent les folies inextricables de nos corps mêlés.
– OK, Piero, restons raisonnables ; à quatre pattes, effaçons les preuves, essuyons le carrelage.
– « Et le temps passe sur les calendriers et le temps casse tous les miroirs qu’on aimait… Et ça fait mal och och och och och! Och! Och och och och och… och ! »
Citations
Sheila, Jesus Vilanueva, Carrère, 1984 : Le film à l’envers
Sheila, Alex Martin, Yves Martin, 1985 : Je suis comme toi
Infographie
Première de couverture de Le Miroir, Pierre Belleney & éditions de l’Obsidienne.